BFA_2013webBruno Faivre d’Arcier, professeur au Laboratoire d’Economie des Transports (LET) de Lyon, se définit avec humour comme « transportologue ».
Il décrit son métier et livre sa vision d’un secteur plus stratégique que jamais.

Qu’est-ce que le LET ?

C’est une Unité Mixte de Recherche spécialisée en économie des transports et en aménagement du territoire, qui associe le CNRS, l’Université Lyon 2 et l’Ecole Nationale des Travaux Publics de l’Etat (ENTPE). Nos travaux se centrent sur l’analyse des relations entre transports, territoires et société. Nous sommes 40 environ, dont la moitié d’enseignants-chercheurs qui sont économistes, ingénieurs mais aussi géographes, sociologues ou spécialistes des sciences politiques. Nous développons une expertise globale et transversale, qui couvre les transports terrestres (routier, ferroviaire) de voyageurs et de marchandises, au niveau local, national et international.

Sur quels sujets travaillez-vous ?

Il y a 3 grands thèmes :

  • La mobilité : l’observation des comportements de déplacements, à travers des enquêtes et analyses spécifiques. Par exemple pour comprendre comment ces comportements évoluent selon les individus et les nouvelles offres de transports (Vélo’V, le covoiturage, l’auto-partage) mais aussi l’impact de l’amélioration du service de transport collectif).
  • Les interactions entre transports, urbanisme, aménagement du territoire : nous travaillons sur des outils de modélisation de ces interactions, pour aider des travaux de prospective, en lien avec les enjeux du développement durable (environnement, énergie, équité sociale, mais aussi croissance économique). C’est par exemple l’impact des projets de transport à Lyon (l’Anneau des Sciences, le développement des tramways, l’auto-partage) sur l’accessibilité à la ville.
  • Les politiques publiques en matière de transport et de mobilité. Ce sont les questions de financement et de tarification, mais aussi l’ouverture à la concurrence dans le ferroviaire ou la mesure de la performance des transports collectifs.
    Sur tous ces sujets, nous conservons notre position de scientifiques pour aider les décisions publiques. Il n’y a donc pas de « position officielle » du LET, prenant parti pour tel ou tel projet. Il y a des sensibilités qui s’expriment et c’est une richesse !

Quels sont les enjeux de la mobilité aujourd’hui ?

Je crois que la mobilité a toujours été un sujet sensible car « visible » : il touche la vie quotidienne des gens. Aujourd’hui, les comportements des individus évoluent, et les systèmes de transport doivent s’adapter. En ce sens la refonte du réseau bus « Atoubus » sur le réseau TCL, qui était un pari risqué, est un succès : le nouveau système a été compris et il est efficace.

Mais un service de qualité a un coût, ce qui pose un problème de financement. Le coût du transport public supporté par l’usager est beaucoup trop faible en France, et il est nécessaire d’augmenter les tarifs. Mais pour garantir une certaine équité sociale, il faut aller vers une tarification variable en fonction des revenus, et non plus en fonction du statut comme actuellement.

L’enjeu de la mobilité aujourd’hui se situe en périphérie des villes. Les alternatives à la voiture se sont bien développées dans les zones denses. Mais dans les zones périphériques, la voiture est largement utilisée. Il faut inventer ici de nouveaux services de mobilité avec l’aide des nouvelles technologies de communication.

Quel est l’avenir du LET ?

Les thématiques de l’énergie, de l’environnement et des transports sont très fortes aujourd’hui, même si la crise économique met en avant la question de la croissance et du chômage. Nos travaux conservent donc une forte utilité sociale, comme en attestent les demandes des ministères, des collectivités locales, et même des entreprises de transport. L’essentiel de nos financements de recherche sont contractuels et proviennent d’appels d’offres, de plus en plus contraints budgétairement. On doit se battre pour garder des moyens, conserver nos postes d’enseignant-chercheur. On a acquis une expertise et une réputation qui nous permettent de sélectionner nos travaux selon leur intérêt en termes de recherche, et on tient à garder le temps de la réflexion : il nous faut 2 à 3 ans pour un vrai travail de recherche.

Il y a une expertise lyonnaise dans ce domaine de la mobilité ?

C’est évident, Lyon est connu en France comme un vrai pôle de recherche et de formation dans le domaine du transport. Il y a de nombreux acteurs présents, comme l’IFSSTAR, le CEREMA, la CODATU, le LET, les Universités et écoles d’ingénieurs, mais aussi des bureaux d’études spécialisés et tout un réseau industriel avec des pôles de compétitivité, comme le Cluster Rhône-Alpes Automobile, ou Lyon Urban Truck and Bus (LUTB), avec lesquels nous avons des collaborations. Et bien sûr, le réseau TCL est un de ces acteurs majeurs : c’est un de nos terrains d’observation privilégiés pour nos recherches et pour expérimenter de nouvelles solutions.

 

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